Malgré les indications que nous avions, nous ne trouverons jamais la première station de bus, quant à la seconde, notre plan B, pas de bus pour Xi’an aujourd’hui. Il y a des journées loose comme ça… Quand nous venons de faire 2h de route dans la banlieue pékinoise depuis chez Justin, l’idée de rentrer bredouille nous déconfite. A la recherche d’un plan C nous voilà alpagués par des rabatteurs… Après de longues hésitations, de la négociation et une après-midi d’attente, nous embarquons dans un mini vanne censé nous amener à un bus. « On ne s’était pas dit plus jamais de plan foireux ? ». Nous nous retrouvons de nuit stationnés dans une petite ruelle sans comprendre ce que nous attendons. Heureusement un couple de chinois a fait le même pari que nous ce qui nous rassure un peu sur notre sort. On nous débarquera finalement sur une sortie d’autoroute, où un bus sorti de nulle part et à moitié vide nous embarquera. Et c’est reparti pour 14h de bus couchette !
Xi’an est une ancienne capitale, notamment connue pour ses remparts. Mais à 13,5 euros par personne la balade, nous nous contenterons de pédaler à leurs pieds. Nous commençons à comprendre qu’en Chine la moindre attraction touristique se monnaye. Si certains sites telle que la cité interdite restent abordables car destinés aux chinois, d’autres plus tournés vers l’étranger sont vraiment disproportionnés. Ça promet…
Nous nous régalerons dans le réputé quartier musulman, nous émerveillerons dans la ruelle de la calligraphie, et apprécierons nous promener de nuit dans le parc de la petite pagode de l’Oie sauvage. La vieille ville est vraiment très belle et agréable à visiter. Se promener à vélo reste toutefois compliqué, les parcs et places publiques leur étant interdit en Chine.
Gong, notre warmshower, habite un appartement dans un petit immeuble vieillot d’une résidence. Il héberge de jeunes lycéens en pension complète. Dès le premier soir il nous invitera au restaurant et nous fera goûter toute sorte de spécialités. Gong est d’une générosité incroyable. En plus de son accueil, nous repartirons avec des cadeaux !
Xi’an est aussi connue pour son armée de soldat en terre cuite. Mais notre étape n’est que de 2 jours et nous choisirons de visiter le petit vignoble de Gong à une heure de route d’ici. La vigne n’est pas la même que chez nous, et c’est fort intéressant de découvrir le vin chinois, et fort délicieux de manger ses grappes. Voilà seulement 3 ans que sa famille est passée de l’élevage de canard au raisin et ils se lancent tout juste dans le vin. Nous passerons une super après-midi. Nous irons chercher ses neveux à la sortie de l’école et ferons sensation devant les grilles. Ici les parents et les enfants se rangent à la queue leu leu et c’est un par un que l’enfant est remis à ses parents, moyennant badge avec photo de l’enfant (ce qui prend un peu de temps). On vous disait que les chinois adoraient la sécurité… Nous cuisinerons également des sortes de raviolis maisons que nous nous promettons de refaire chez nous.
Nous serons enchantés par cette étape et par la rencontre de Gong que nous espérons voir un jour pédaler en Europe. Le départ se fait au petit matin et sous la pluie : salle journée ! Sauf que nous sommes en Chine… 1h plus tard nous voilà avachis sur le canapé du personnel de la compagnie de bus, avec thé chaud et clope sociale.
Nous arrivons à Pékin Beijing au petit matin après 2 jours de voyage depuis UB. C’est en bus couchette que nous finissons notre périple. On nous avait annoncé le pire, nous avons trouvé l’expérience plutôt rigolote.
Grâce à notre g’palémo et à la gentillesse des chinois, nous avons trouvé sans difficulté la station de bus dans la ville juste après la frontière. Par chance le bus partait 45min après. Le paysage nous était familier : désert, chameaux, yourtes, troupeaux. Les visages eux bien différents.
Nous voilà lancés tout excités à l’assaut de cette capitale aux 6 périphériques. Heureusement nous sommes du bon côté, mais une bonne 1h30 seront nécessaires pour atteindre la maison de Justin. Nous sommes dimanche, mais ici, le repos ne semble pas exister. 5h c’est l’idéal pour chevaucher notre monture avant que la ville ne se réveille. Mais le chinois se lève tôt et le temps passe vite, il n’est pas 6h que des centaines de scooters, vélos, tucktuck et autre 2-3 roues non identifiés débarquent de toute part. Bienvenue en Asie ! La conduite est sport. S’il y a une voie spéciale 2 roues, elle est à double sens. Le slalom et la vigilance sont de rigueurs pour ne pas se faire couper en 2. Néanmoins nous nous réjouissons de retrouver une ville conçue pour les 2 roues !
Nous sommes tout joyeux d’arriver en Chine. La Mongolie nous a usé. Nous nous sentirions presque chez nous avec les infrastructures retrouvées, les parcs, les cours d’eau, un peu plus de calme et le sentiment de meilleur respect des règles. La rigueur à la chinoise semble tout de même s’arrêter là où les véhicules circulent : c’est un grand bordel ! Nous découvrirons rapidement l’air pollué tristement célèbre. Le ciel est jaune. Les masques de sortie. Nous ne voyons pas à 50 mètres.
Justin habite un petit paradis qui malheureusement sera détruit d’ici quelques mois. Le gouvernement a « exproprié » les bailleurs pour construire d’énormes buildings. Ces derniers n’ont rien à dire puisque les terrains appartiennent à l’Etat. Certains sont déjà en construction et c’est jour et nuit que des ouvriers – logeant dans les fameux préfabriqués – y travaillent. C’est impressionnant.
Le lieu est un ancien restaurant haut standing installé sous une serre florissante, en bord de lac, accompagné de « petits » bungalows. C’est splendide. Justin et les anciens proprios nous mettrons gentiment l’un d’eux à disposition. Nous y passerons une semaine à profiter du lieu et visiter la capitale. Le métro à Beijing c’est très facile et rapide. L’aller/retour en tandem à la cité impériale sera l’équivalent d’une étape (70km!). Cette ville est juste énorme, et les buildings poussent tels des champignons.
Les chinois sont fou de sécurité. A la nuit tombée – 18h30 – policiers et militaires convient la population à quitter les espaces publiques. Les grandes places, musés, métros, sont équipés de portiques de sécurité et de scanners. La police est très présente avec parfois des fourgons blindés. Pour autant, très peu d’agents sont armés, on ne se sent pas du tout inquiet, et outre l’effet dissuasion d’une quelconque protestation, les policiers semblent au service de la population : renseignements, port de bagages, etc. Avec nous, ils sont souvent souriants et nous prennent en photos !
Le dernier jour nous suivrons les conseils de Justin pour visiter la muraille de Chine comme vous ne l’avez jamais vu. Son chauffeur arrondira bien sa fin de mois pour nous y emmener mais à part ça l’aventure fut extra ordinaire. Il nous déposera 5 kms en amont de la partie restaurée de la muraille. Il nous faudra nous faufiler dans la montagne arborée pendant quelques kms avant de grimper sur le mur en ruine. « Aller à droite, marcher 5kms, et vous atteindrez la partie touristique. Le chauffeur vous attendra au parking ».
Là il nous faudra avoir la foi pour oser continuer. Nous crapahuterons comme nous le pourrons au pas de course avec nos chaussures de vélo sur une muraille plusqu’en ruine, humide, végétalisée, où des arbres ont remplacé des tours, et où des parties sont éboulées. Le tout sous un brouillard où l’on ne voit pas à 10 mètres et avec seulement quelques heures de jours devant nous. Pour la superbe vue c’est raté, mais pour l’expérience c’est gagné ! Heureusement nous croiserons des chinois qui font la route en sens inverse. Sinon nous aurions sûrement abandonnés.
La muraille nous apparaît tel un dragon parcourant les crêtes montagneuses. S’étendant sur 20 000 kms, ils auraient mis 2000 ans à la construire ! On se demande quand même un peu ce qu’il leur est passé par la tête…
Nous arriverons de nuit, trempés de sueur, congelés, et les jambes tremblotantes qui me vaudront les pires courbatures du voyage. Mais nous venons de vivre l’une des expériences les plus mémorables depuis notre départ !
C’est avec un peu d’empressement que nous quittons la Mongolie l’automne l’hiver arrivant au gallo. L’automne en Mongolie ce sont les premières neiges et les premières gelées. Pédaler sous les flocons c’est rigolo mais seulement quelques minutes.
Wikipédia nous racontait qu’Oulan-Bator avait le record de la capitale ayant la moyenne de température sur l’année la plus basse de la planète ? Et bien on a vérifié, ça semble vrai !
Conseil pour les cyclos : passez la frontière en train si possible.
Prendre le train mongol vers la frontière a été une expérience. La synthèse est à l’image du pays : il y a des règles que personne ne suit parce qu’elles ne sont pas adaptées. Plus tu essayes d’être en règle, plus tu perds de temps, d’argent et tu deviens à moitié fou à la fin. La règle c’est donc de ne pas respecter la règle.
Pour faire rapide, nous avons fait voyager notre vélo tout encartonné non pour l’hiver mais pour le protéger des « brutes » chargeant les wagons bagage. Nous avons dû l’amener 1 jour avant le départ du train (ça c’est la règle) pour pouvoir raquer à l’arriver du gardiennage (malin le mongol ?). Sauf que nous avions besoin de récupérer rapidement notre matériel pour monter dans le bus de 7h du mat là ou la consigne ouvre à 9h : chercher l’erreur !
Voilà qui nous a mis en joie quand nous avons récupéré notre matos, exténués d’avoir courus dans toute la gare et arrivant nettement après la bataille. Du coup nous voilà négociant un taxi pour passer ce pointillé en trait gras sur notre carte.
Nous ne sommes pas vraiment des violents mais l’affaire a faillit en finir aux mains. Notre chauffeuse a tenté de nous placer dans un bus à la frontière pour Beijing, jusque là : bonne idée. Sauf qu’elle a fait tombé son portable dans l’empressement et que le bus ne voulait pas s’encombrer d’un tandem, normal. Elle a voulu nous faire payer son portable à nous fouiller dans les poches et à garder en otage nos bagages dans son coffre. On a lâché un peu plus que ce qu’on lui devait et elle a essayé de nous intimider par tous les moyens pour nous en extorquer un peu plus. On est des bisounours mais là elle avait clairement dépassé la frontière. Mouhais %*££*#1@…, peut-être que cet endroit rend les gens un peu bestiaux ou alors est-ce que c’est plus lié à la culture mongole ?
On aurait pu en terminer là mais le plus fou était à venir.
Un peu choqués et n’ayant pas tellement envie de reprendre un taxi, nous restons quelques minutes à voir comment ne pas se faire plumer à nouveau. Nous ne comprenons pas pourquoi de vieux 4×4 tout défoncés embarquent les gens juste avant le poste mongol. Ça négocie et ça embarque…
Nous décidons finalement de tenter de passer la frontière à vélo alors que nous savons que ce n’est pas possible. Les gardes mongols après avoir bien rigolé nous place de force dans un 4×4. Virginie répète 3 fois « No money, no money… » C’est une chauffeuse plutôt sympathique, et si la chance tournait ?
Sous la neige s’organise la plus grande compétition d’auto tamponneuse que nous n’ayons jamais vécus. De 15 files de voitures et camions, il doit n’en rester qu’une à la fin pour entrer coté chinois. Tout est permis : ça klaxonne, ça tamponne, ça insulte. Virginie se retrouve même à un moment à devoir conduire le 4×4 de la place du mort parce que la chauffeuse est descendue et que le 4×4 de derrière nous pousse pour ne pas perdre de place. Des gens montent et descendent de notre voiture, nous ne comprenons rien, le tout toujours sous la neige battante.
La chauffeuse au premier abord charmante commence à nous demander des ronds pour la « taxe vélo ». Nous tiendrons bon jusqu’au bout, même lorsqu’elle fait croire que le reçu de passage donné par un policier est le reçu de la taxe vélo. A court d’idée devant 2 français remontés à bloc elle nous laisse sur la bas coté de la route en nous crachant de sales mots à la figure. Fini la Mongolie, nous sommes en Chine !
Joli ?! Merveilleux oui, époustouflant, grandiose ! En un même lieu nous avons eu l’impression de visiter le Sahara, le Grand Canyon, et les Alpes !
L’un des plus grands déserts au monde, partagé entre le sud de la Mongolie et le nord de la Chine, nous n’en visiterons qu’une infime partie autour de Dalanzadgad, que nous rejoindrons en bus (comptez 10h).
Fortement déconseillé en stop en basse saison et bien trop galère à faire en tandem, nous opterons comme tout bon touriste au package « chauffeur 4×4 » non sans culpabilité. « Quoi ? Vous voyagez en vélo dans une démarche écologique et vous vous payez 4 jours de 4×4 en plein désert ?! » Nous exploserons le budget, mais passerons des moments magiques et nous en mettrons plein les yeux. Même si nous aurons beaucoup de mal à apprécier ce mode de tourisme nous ne regrettons pas ce craquage. Nous y fêterons nos anniversaires que nous ne sommes pas prêts d’oublier !
Une hétérogénéité des paysages qui donne au Gobi une importante variété de couleurs. Ici la vie foisonne : souris, marmottes, troupeaux, chevaux, chameaux, gazelles, bouquetins, lézards, rapaces, nous visiterons même des maraîchers !
Tempête, orage, arc en ciel, chaleur, dunes de 180 mètres de haut qui ressemblent à de la crème glacé au café… Mieux qu’un discours, place aux images !
Nous voilà en route pour cette ancienne capitale du grand empire mongol du début du 13ième siècle. C’est le grand Gengis Khan qui décida de faire de cet endroit stratégique la capitale de son empire. Ce qui est fou c’est que cette ville qui a compté jusqu’à 15000 habitants au début du 14ième siècle n’en compte que 4000 aujourd’hui. La vieille ville a passionné les archéologues du monde entier ces dernières décennies. Quand on voit l’environnement et la dureté du climat on se dit qu’il y aurait mieux comme endroit. La réponse est dans le musée de la ville. C’était en effet un endroit central pour l’empire alors constitué. La ville est également naturellement protégée par les montagnes au sud ouest. Elle est enfin dans la vallée d’Okhron : cette rivière s’écoulent jusqu’au lac Baïkal et en fait un axe de transport privilégié. Gengis Khan et ses descendants avaient une façon assez expéditive de conquérir les territoires : soit les populations acceptaient d’entrer dans l’empire et pouvaient conserver leurs religions, leurs biens et leur culture, soit la force militaire s’abattait sur eux. L’histoire a retenu presque traumatisée combien le guerrier mongol pouvait être violent et impitoyable envers ceux qui ne se soumettaient pas.
La ville à sa grande époque contenait dans son enceinte des temples bouddhistes, taoïstes, des mosquées et même des églises chrétiennes. Sous ses apparences de chef sanguinaire Gengis Khan était en fait un fin tacticien et avait compris que pour faire un grand empire il faut tenir compte des particularismes de chacun des peuples.
Et toujours cette douce impression que l’histoire se répète …
Nous voilà « on the road » avec Simon et Ombeline nos frais amis d’Oulan Bator. C’est excitant de rouler en peloton. Pour l’occasion nous partons sans remorque et avec notre deel (prononcer « delch) ce grand manteau mongol pour affronter les froids qui s’annoncent. Autant je suis content de poursuivre l’aventure mongole, autant ce n’est pas l’avis de tout le monde.
La sortie d’Oulan Bator est une nouvelle épreuve au milieu de ces bus, camions ou autres 4×4 déversant leur pollution de vieux moteurs mal réglés. A cette pollution s’ajoute la conduite approximative (« ils conduisent leur bagnole comme s’ils étaient sur leur cheval… ») et le fait que les vélos n’existent pas pour eux sur la route.
Les tracas de la ville sont bien vite oubliés quand nous commençons à poser nos roues dans ces grands espaces. La steppe mongole se déroule à l’infinie devant nos yeux : comment ne pas tomber sous le charme ? Les animaux, les cavaliers et les motards nous font l’animation. C’est toujours rigolo de devoir s’arrêter pour laisser passer un troupeau de chameaux partant boire. Les automobilistes mongoles ne trouvent pas ça si rigolo à priori.
Nous ferons de belles rencontres durant ces quelques jours à commencer par Patsarah et toute sa famille qui nous ont accueilli dès le premier soir. C’est vrai qu’après l’avoir croisé 2 fois, dont une fois autour d’une bouteille de vodka, ça crée des liens. Il nous rattrapera en moto comme il fait avec ses troupeaux pour nous ramener à sa yourte. Soirée pattes au mouton-rigolade-photos-jeux de carte et le pompon, une yourte bien chaude !
Nous aurons également la visite régulière de bergers chaque midi venant taper le café et des gâteaux. Le tabac se roule ici dans du papier journal !
Nous serons concentrés durant ces quelques jours sur l’approvisionnement en eau et en nourriture. Comme de bons français et à force d’avoir peur de manquer il est vrai que nous nous ferons des gueuletons comme jamais nous en avons fait en 5 mois de voyage. On customise le gouter trappeur en chappattis fris à l’huile : une tuerie ! Sauf que les villages indiqués sur la carte n’existent pas tous et inversement. Au soir du 5ième jour nous sommes à cours de vivres et nous commençons le rationnement. Au petit matin nous arrivons dans un camp de yourtes pour touristes au bord du lac Ogii Nuur. Notre chance est de se faire inviter pour un petit déjeuner de princes. Cette équipe composée d’anglais, d’une néerlandaise et d’un japonais rentre sur la capitale et nous laisse une bonne partie de ses vivres : youpi ! Comme si ça ne suffisait pas un groupe de sud Coréens nous fait le même honneur et nous voilà les sacoches pleines : et oui c’est un peu toujours comme ça la magie du voyage.
Nous resterons ces images de chevaux galopant dans nos roues ou ces montagnes enneigées des premières neiges d’une nouvelle saison d’hiver qui commence. Nous laissons nos amis en pédalant sous la neige pour prendre un bus vers Oulan Bator et sauter dans un train pour la Chine fin du visa oblige. Merci les copains pour ces quelques jours avec vous. On a abordé à peu prés tous les sujets du voyageur à vélo et nos expériences partagés nous voilà regonflés pour quelques mois de plus.
La Mongolie c’est quand même une drôle d’expérience !
Alias UB pour les intimes, est une capitale pas comme les autres :
– classée seconde ville la plus polluée au monde par l’OMS,
– située à une altitude de 1300 mètres elle est la Capitale la plus froide du monde,
– elle héberge presque la moitié des habitants du pays,
– elle est entourée de montagne dont 4 monts sacrés
Il ne fait pas vraiment bon de rester à UB : air saturé, bouchons, conduites folles, klaxon à tout va, odeurs nauséabondes… ça dénote avec le reste du pays.
Et pourtant nous y passerons une bonne partie de notre séjour et finirons par nous y sentir chez nous !
Nous emménagerons début septembre chez Froit – un hollandais – et sa femme Bolora, des warmshowers qui mettent gentiment à disposition leur atelier de fabrication de yourte quand il fait trop froid pour planter la tente. Un lieu exotique et super bien situé pour séjourner !
Nous y apprendrons les tracas administratifs pour l’obtention du visa chinois qui mettent en émoi tous les touristes qui comme nous ne font qu’étape en Mongolie. Il est dorénavant impossible d’obtenir un visa en dehors de son pays (sauf pour les expates). Nous avons deux solutions : retourner en France ou choisir un autre pays – dixit Monsieur le Consule. Nous filerons donc au service de l’immigration tout prêt de l’aéroport pour étendre de 10 jours notre visa, le temps de voir comment évolue la situation. Sur la route j’aurai ma plus grande frousse : il ne fait pas bon de pédaler ici.
Cette première semaine dédiée normalement aux formalités, sera donc consacrée à la remise en forme des troupes, bien usées.
Après notre petite excursion dans le Gobi (article à venir), retour à la « maison », où nous trouverons deux colocs : Ombeline et Simon, deux cyclo français en tour du monde pour 2-3 ans (www.simombel-vanbiketour.com)
10 jours se sont écoulés, et la plupart des touristes rencontrés se sont envolés pour la Corée ou le Japon. Le consulat chinois ne semble toujours pas revenir sur sa position, alors nous activons nous aussi notre plan B, mûrement réfléchi : le Myanmar ! Ici deux solutions : retourner en Russie (mais visa très compliqué à avoir) ou prendre un avion. Nous sommes coincés. C’est très frustrant. Après avoir comparé une dizaine de vol et s’être inventés de multiples destinations qui nous ont fait rêver, le bon compris était de s’envoler vers le Myanmar et de faire une croix sur notre volonté de ne pas prendre l’avion, après tout juste 5 mois de voyage.
Alors que nous aurions dû valider notre achat de billet depuis quelques heures, Froit nous apprend qu’avec une lettre de notre ambassade, la situation chinoise se débloquerait !!
Cool cool zen zen on garde son calme… en voyage il faut savoir être adaptable… hum… hum… Branle-bas de combat, nous préparerons nos dossiers et passerons une chouette semaine tous les 4 à faire des queues interminables devant le consulat ouvert seulement le lundi, mercredi et vendredi.
Le bouche à oreille circule vite et à 7h30 lundi il y a déjà une dizaine de personnes devant nous alors que les portes n’ouvrent qu’à 9h30. Priorités aux mongoles qui ne cessent de défiler sous nos yeux, on nous fermera la porte au nez « il est 12h le consulat ferme! ».
Au vue du nombre d’étrangers déboutés, les garçons décideront de se poster devant le consulat à 4h30 du matin le mercredi ! Si nous étions arrivés en fin d’été à UB, les premiers flocons de neige sont désormais de la partie, l’hiver arrive d’un coup… mais nos efforts seront récompensés, cette fois-ci nous sommes les premiers.
Mais (!) du fait de la fête nationale chinoise, le consulter va fermer ses portes pendant 10 jours ! Il ne ré ouvrira que le 10 octobre. Notre visa se termine le 9 et nous ne pouvons plus l’étendre… Nous faisons alors une demande de visa « rush » qui nous coûtera le double du prix initiale (heureusement il n’est qu’a 30$ pour les européens). On vous passe les détails folklo…
Visa en poche nous pensions partir en suivant pour Beijing, mais tous les avis sont unanimes : il est fortement déconseillé de voyager en Chine pendant la fête nationale. Pas de zone de vacances comme en France, ce sont plus d’1 milliard de chinois qui sont en vacances en même temps, plus tous les expates qui rentrent au pays. Transports bondés, queue interminable à la frontière avant que celle-ci ne ferme 3 jours, capitale surchargée, et prix qui augmentent. On s’imagine mal avec notre tandem et notre remorque dans tout ce bazar. On aurait pourtant bien fait la fête avec eux ! La Chine attendra encore…
Nous décidons d’enfourcher notre tandem pour un petit tour dans l’Ouest avec Ombeline et Simon en espérant ne pas mourir de froid…
De retour à UB, nous avons vraiment le sentiment de rentrer à la maison, première fois en 5 mois que nous retournons 3 fois dans un même lieu. C’est agréable même si nous avons le coeur serré de ne pas y retrouver nos collocs.
Nous retrouvons nos habitudes, nos marchands de légumes, nos conducteurs fou…
La ville a définitivement mis son apparat d’hiver : tous les monts sont drapés de blanc, et des mottes de neige décorent les rues. C’est fou le changement d’ambiance en un mois ! Il est vraiment temps de partir. Nous avons pourtant la désagréable sensation d’abandonner le pays, ses habitants et ses animaux, à l’hiver si froid et si rude… nous avons le luxe de pouvoir passer l’hiver ailleurs, eux non.
2 petits jours pour acheter nos billets de train, embarquer le vélo et la remorque, préparer notre arrivée en Chine… et hop nous quittons la Mongolie après plus d’un mois dans cet extra-ordinaire pays. Nous y rencontrerons énormément de français, et si septembre est la basse saison, on peine à imaginer le nombre de touristes qu’il doit y avoir l’été !
Train pour la frontière + bus jusqu’à Beijing, nous espérons arriver dimanche chez Justin : un australien, amis d’Antoine, le frère de Mathias, que Benoît a rencontré cet hiver à Toulouse. Vous suivez ? Un grand merci à tous les 3 !
Cap plein sud ! Nous entamons notre deuxième grand virage du voyage. Après le nord, puis le grand est, nous commençons notre descente du continent. Notre ombre nous accompagne désormais du matin au soir. Nous découvrons la région de la Bouriatie et ses habitants, nés d’un brassage entre populations chamanistes indigènes et nomades mongols, nous nous croyons déjà en Mongolie !
La reprise se passe plutôt bien les premiers jours. Nous sommes heureux de remonter sur notre vélo et retrouver nos habitudes. Malgré la fin de la trêve « vélonale », nous apprécierons retrouver notre « chez nous » – qui se résume au tandem – de reprendre notre rythme, notre routine. Notre quotidien justement se résume à mettre le réveil aux alentours de 8 heures, plier la tente et la couche, petit déjeuner, recharger le vélo – et pour ça il nous faut 1H30 en prenant plus ou moins notre temps. Quelques coups de pédales plus loin, nous nous arrêtons souvent faire des courses (pain – pique nique du midi – qui l’eu cru nous sommes devenus des aficionados du super marché !). Nous sommes contents lorsque nous avons fait minimum 30 kms le matin. Les matinées où l’on n’avance pas annoncent souvent des journées à petit kilométrage ou des après-midi trop longues. Le temps de vélo est rythmé par les besoins de pause et la prise de photos. Nous nous arrêtons souvent vers 13 heures pour deux heures de pause déjeunée accompagnée parfois d’une petite sieste quand la météo le permet. Puis nous reprenons la route et pédalons plus ou moins tard jusqu’en fin d’après-midi, où nous recherchons un endroit pour nous laver et pour bivouaquer. L’objectif kilométrique de la journée et les points d’eau donnent souvent le la. Décrassage, lessive, l’un monte la tente pendant que l’autre cuisine au feu de bois ou au réchaud, et nous voilà au lit à la tombée de la nuit. Un peu de lecture ou d’écriture si la fatigue le permet, et nous plongeons relativement vite dans les bras de Morphée. La nuit est quant à elle rythmée par les bruits et le trop plein d’eau avalé dans la journée. Le réveil sonne souvent trop tôt à notre goût et il nous arrive de le repousser. C’est parti pour une nouvelle journée !
Ici les aurores sont fraiches et le soleil se couche tôt (21h). A 18 heures la chaleur nous quitte et le vent nous glace. La fenêtre pour pédaler s’est considérablement amoindrie depuis l’Europe.
Au 3ème jour les courbatures se font sentir, les genoux font la grimace, nous cachons mal le stress du timing que le visa nous impose, le temps se gâte un peu et il nous faut malheureusement quitter le Baïkal : son eau douce à profusion, ses bivouacs magiques, ses vagues, et son vent endiablé. Il nous vaudra l’ensablement de la tente en pleine nuit ! L’impression de l’avoir à peine découvert qu’il nous faut déjà lui dire adieu. « Tu crois qu’on le reverra un jour ? » « non… et toi ? » « En hiver j’espère ».
Benoît s’est mis au cyrillique, ce qui nous permet de déchiffrer et d’échanger quelques mots avec les curieux qui nous accostent. Nous passons notre temps à répondre aux mêmes questions : « atkouda ? » « France » « Kuda? » « Mongolia »… J’en rêve la nuit.
Le col qui nous permettra d’accéder à Ulan Ude finira de nous achever. Nous l’avons pourtant anticipé et décidons de dormir à ses pieds, mais nous ne l’imaginions pas si durs. 10 kms de bonnes côtes, avec des pentes allant de 4 à 11%, nous pousserons une partie de la montée, en sueur, aux côtés des klaxons russes devenus habitude, des chauffards qui nous frôlent, des camions de bois… et tous les deux virages on croira au bouquet final ! Nous arriverons tout de même au col en pédalant ! « Tu crois qu’ils ont des Ventas eux aussi en haut de leur col ? » Et bien oui, une petite bicoque de bois nous propose à notre arrivée un barbecue, nous nous contenterons d’une bière pour fêter notre premier col à 1200 mètres. On se couvre comme il se doit par ce temps frais pour la descente mais oh surprise, ce n’était pas le vrai bouquet final, il reste une bonne côte à 9%… allez on se re-déshabille et on pousse !
On nous offrira deux magnifiques pomme de pin « Merci c’est gentil mais pourquoi ? » « Laisse tomber ça doit être des portes bonheurs, allez pousse ! ». Rebelote en haut du col. Pour nous tout est devenu chamanique depuis quelques jours. Alors on remercie et propose de les mettre au pied de l’autel, présent en haut de chaque col – sûrement pour se porter chance dans la descente – aux côtés des autres offrandes. Notre donneur rigolera et nous expliquera que c’est simplement pour manger les pignons ! Élémentaire… le mystique nous monte à la tête !
A Ulan Ude nous ne savons définitivement plus dans quel pays sommes nous. Les temples bouddhistes sont apparus, le chamanisme est toujours très présent, les églises orthodoxes tentent de persister, les visages sont clairement typés asiatiques même si les têtes blondes aux yeux clairs restent. Nous passerons la nuit à l’auberge de jeunesse U-City pour moins de 1000 roubles histoire de se décrasser, enlever le sable de toutes nos affaires, faire des machines à laver, skyper nos familles et préparer la suite. Nous ne ferons que traverser la ville mais nous arrêterons tout de même sur la place principale admirer l’énorme tête de Lénine. Si chaque ville russe digne de ce nom dispose d’une statue de Lénine, Ulan Ude a le mérite d’y avoir sa grosse tête ! Nous quitterons la ville sous un tonnerre de Klaxon, nous nous serions cru à un mariage !
Normalement nous avons fait le plus dur et le plus long du parcours et prenons le temps d’aller visiter notre premier temple bouddhiste : Ivolginskiy Datsan, que nous recommandons chaudement, même si Virginie grommèlera de devoir se couvrir pour le visiter. Nous y rencontrerons Pia et Martin des allemands en congés sabbatiques qui voyagent avec une remorque, comme nous, mais tiré par un 4×4 ! Végétariens, comme tous les allemands voyageurs que nous rencontrons, ils nous mettent en garde sur la gastronomie carnée des mongols et nous filent les bonnes adresses des « restau végé » en capitale. Nous apprécierons cette visite à leur côté et regrettons que nos chemins prennent des sens opposés.
Nous serions bien restés davantage dans cette ambiance apaisante et ces temples indescriptibles aux milles et une couleur, mais de belles côtes nous attendent encore, il nous faut avancer. Tic tac, tic tac, tic tac.
Le soir nous trouverons un joli lac au bord duquel bivouaquer. L’arrivée est paradisiaque mais nous tomberons vite en enfer : des escadrons de moustiques nous chargent alors que nous sommes encore sur le vélo à 15km/h. C’est la panique, mais ce n’est qu’un mauvais moment à passer n’est ce pas ? Nous plongeons dans le lac et tentons de trouver une solution que nous ne trouverons pas. Si notre corps est à l’abri, notre tête est dans un nuage de moustique ! Benoît sort le premier à toute vitesse et tentera de s’habiller entre deux sauts de biche et en se fouettant. Nous couvrons chaque partie de notre corps en multiples couches. Il doit encore faire 20°C, et en 5 min nous sommes à nouveau en sueur. On décide de repartir le plus vite possible de ce lieu maudit mais dans la panique Virginie oubli notre gilet jaune de sécurité. Allez hop rebelote, on y retourne. On finira par balancer la tente qui nous fait office de moustiquaire, jeter toutes les affaires dedans de manière ingénieuse pour éviter de faire rentrer la colonie, et passerons la soirée en cage à petit déjeuner plutôt que dîner. Choqués du moustique de Sibérie, nous profiterons tout de même de la vue et d’un magnifique ciel étoilé.
Mais le lendemain, ils sont toujours là, à nous attendre, affamés. Et nous découvrirons avec angoisse que ce n’est pas le lac le problème, c’est toute la région ! Le vent et la fraîcheur du Baïkal nous manque… nous repasserons un deuxième bivouac dans les mêmes conditions, mais en nous organisant mieux, nous le vivrons plus facilement, et un troupeau de jeunes taureaux viendra nous changer les idées.
Nous avons définitivement pris la grosse tête : nous ne répondons même plus aux trop nombreux Klaxons d’encouragement qui nous exaspèrent et cassent les tympans. A part cela nous ne nous croyons décidément plus en Russie. Le dernier soir, la pluie nous a rejoint, nous sommes mouillés, refroidit, tout boueux, et toujours courtisés par les moustiques. Nous forçons alors le destin. A défaut de pouvoir être hébergé au flambant neuf orphelinat, où la serviabilité de jeunes enfants aux visages beaucoup trop marqués par la vie nous touchera, nous échouons chez une famille bouriate. Nous passerons une soirée extraordinaire chez Sergueï et Dadi. De la cour toute boueuse initialement prévue, nous camperons finalement dans leur salon (ils iront même jusqu’à nous proposer leur lit). Nous dînerons à leur table, et passerons une bonne partie du temps à discuter et regarder des vidéos youtube sur leur région. Alors que nous trimbalons notre petit album photo version années 90, eux sont à l’air du numérique et nous font défiler moultes photos sur les derniers Smartphones à la mode. Nous utilisons pour la première fois notre petit guide g’palémo (merci Mélanie), notre globe terrestre gonflable, et usons sans modération de l’application google traduction (merci les copains voyageurs).
Le lendemain, c’est plein d’émotion que nous quitterons cette incroyable famille au cœur sur la main. Comme nous, ils ont dû se dire que la vie était décidément pleine de surprise. Sergueï nous accompagnera jusqu’à la route principale sur sa 125.
Nous étions rentrés en Russie la boule au ventre, nous en repartirons un mois après le cœur serré.
Il est 12h30, nous sommes à la frontière – pourquoi nous stressions déjà ? – nous n’attendons que 5 min, et là « niet » « no pasaran ». Le douanier confirme ce que nous avait signalé un sud coréen croisé sur la route, nous ne pouvons passer à vélo. Par chance, moyennant 350 roubles, nous embarquons à bord d’un petit fourgon Kia qui nous emmènera jusque de l’autre côté. Tout se passera très bien et relativement rapidement, si ce n’est qu’il nous aura fallu faire une confiance aveugle à notre chauffeur mongol le temps de faire nos papiers d’entrée.
Youhouuuu à nous la Mongolie !!!
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Une nuit en Sibérie, c’est quoi ? (Réalisé sans vodka)
Nous poursuivons le voyage avec nos deux compères rencontrés dans le Transsibérien : Johannes et Hilmee. Le chargement du minibus qui doit nous emmener à Khoujir est plus que périlleux. Le chauffeur commence par dire « niet, niet, niet…». Nous insistons, nous avions prévenu à l’avance, on nous avait dit oui, donc… mais ce sont les autres passagers du minibus qui grognent le plus, apeurés qu’on leur abîme leurs affaires. Ils sont tchèques et nous aurions espéré un peu plus d’entre aide entre voyageurs européens. Nous ne nous démontons pas, avec Johannes nous utilisons les méthodes de communication non violente et tentons de garder notre calme malgré la situation quelque peu stressante et tendue. Ils finiront par se détendre et deviendront même serviables ! En voiture Simone ! Le vélo sur le toit, le tandem dans le couloir du minibus, la remorque à l’entrée du minibus, toutes les sacoches par ci par là, nous avons désormais plus peur de rien, et confirmons ce qu’on nous avait dit, ça passe partout, avec persévérance, médiation, et en oubliant un petit peu la réglementation ^^
La route qui mène sur l’île d’Olkhon donne le ton : c’est toute la région qui se veut sacrée ! Rubans chamaniques et petits autels habillent notre parcours, les premières yourtes apparaissent, tout comme l’élevage et les paysages vallonnés qui nous font déjà croire en Mongolie. La route est splendide et je suis bien contente d’être en voiture : nous découvrons ce que veulent dire « montagnes russes », certaines côtes sont impressionnantes.
L’île d’Olkhon est considérée comme le centre sacré du monde des chamans du nord, et le centre suprême est représenté par le rocher des chamans, très connu dans la région et qui vaut le détour. Mais ce qui nous marquera le plus ce sont les poteaux en bois sculptés sur lesquels sont nouées des écharpes à dominance bleu, que l’on retrouve sur toute l’île et même dans toute la région. De nombreuses offrandes à leur pied : monnaie, billet, cigarettes, nourriture, et même lunette de soleil ! Si individuellement les maisons de bois et centres touristiques sont plutôt beaux et respectueux du cadre et de l’environnement, globalement les villages sont moches, sans cohérence et pollués. Pas d’asphalte ou très peu sur l’île, du sable, de la piste terreuse, et des 4×4 dans tous les sens. Le climat se veut très sec, ensoleillé, venteux. Les sols sont pauvres.
Notre chauffeur nous déposera à notre demande sur la plage qui de nuit est parsemée de petits feux et de tentes. Au réveil, surprise, le lac de Sylvain Tesson est tout près, splendide ! Il est la plus grande réserve d’eau douce liquide de la planète, et malgré qu’il soit le plus profond des lacs, ses eaux sont cristallines, la visibilité est unique, et il n’est navigable que l’été, étant recouvert de glace le reste de l’année, sur laquelle les voitures s’en donnent à cœur joie. Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco pour sa richesse écologique, on s’inquiète toutefois du manque de traitement des eaux usées, de la quantité folle de déchets qui le bordent, et du boom touristique. Le nombre de touristes est impressionnant sur l’île et nous croiserons pas mal d’occidentaux, de russes, de chinois mais aussi des biélorusses, des kazakhs… et des grenoblois qui nous donneront rendez-vous à notre retour ! Cela fait plaisir d’échanger avec eux, car on ne peut pas dire que les compatriotes rencontrés précédemment nous aient inspirés.
Nous passerons deux jours avec Johannes et Hilmee à faire des petits sauts de puce, tentant de s’éloigner du monde, sans trop s’écarter de Khoujir d’où ils repartiront, avec un accès direct au lac, ce qui n’est pas chose aisée. L’île s’élève globalement au dessus du lac : dunes, collines, falaises, il nous faut trouver les criques et plages accessibles. Nous serons rejoins par Vlada une russe qui vient se ressourcer quelques jours. Nous découvrirons la vie de voyage en groupe et devrons nous adapter aux rythmes et envies de chacun, et ce n’est pas aussi simple qu’imaginé. Mais nous formons une belle équipe et nous nous attacherons à ces deux petits gars qui nous donneront rendez-vous à Tawaïn… Benoît s’y voit déjà !
Nous en profiterons pour nous éloigner davantage vers le nord de l’île, à la recherche d’un petit coin de paradis, où nous passerons deux jours seuls (ou presque) en mode Robinson Crusoé, juste nous et le mythique Baïkal. Où nous gouterons à l’essentiel ! On se croirait à la plage, mais cette immense baignoire d’eau douce nous permet d’être complètement automne en eau. Une légende dit que lorsqu’on se baigne dans le Baïkal nous gagnons 5 ans de vie. Benoît ira jusqu’à 5 baignades par jour malgré la fraîcheur de l’eau. Et lorsqu’on la boit ? Benoît en profitera pour parcourir à vélo le cap nord et l’est de l’île tandis que Virginie farnientera au côté de nos premiers yacks qui la fascinent ! Notre petite plage est régulièrement visitée par les vaches (qui se montreront très curieuses de notre bivouac) et par les yacks qui viennent faire trempettes tôt le matin jusqu’à tard le soir. Il fait beau et chaud, nous avons le droit à un micro climat, les orages quotidiens s’arrêtent aux portes de notre crique, ce qui n’est pas le cas du vent, qui déchaîne le lac. Nous découvrirons notre première marmotte locale, à mi chemin entre l’écureuil des sables et la mangouste.
Il nous faudra repartir sur Khoujir, avec un pincement au cœur de quitter ce lieu magique, dans l’attente du Ferry pour la rive est. En rentrant, -BAM-, belle gamelle, la première digne de ce nom. Les pistes de l’île ne pardonnent pas chargés comme nous sommes. Nous laisserons un peu de notre peau au Baïkal. On s’est tous les deux refaits le côté gauche, rien de grave mais de bonnes égratignures qui nous pourriront bien la vie des 15 prochains jours. Nous sommes un peu choqués… La remorque aussi sera bien égratignée, quant au tandem : porte bagage sectionné et sacoche déchirée.
Le week-end ne sera pas des plus agréables, la pluie ne nous épargne plus, trop de touristes qui se permettent tout et n’importe quoi avec le Tandem, trop de bruits, trop de déchets, et trop d’alcool -> nous assisterons à un bel incendie de maison à 400 mètres de nous en pleine nuit ! Vive la vodka ! Nous avons hâte de reprendre la route, et partir d’ici. Mais Valéria et John, deux jeunes russes backpackers voisins de notre tente nous ferons regretter notre départ. Nous partagerons seulement 2 heures de déjeuner avec eux, mais ce seront 2 heures magiques et incroyablement fortes. Géopolitque, philosophie de vie, nous nous sentons connectés et ils nous couvriront de cadeaux et de chaleur, dont le plus beau sera une magnifique chanson à la guitare louant le voyage.
Nous partons au pas de course car personne ne sait où accoste le fameux ferry ! Nous voilà à courir partout, du port, au cybercafé, aux plages. Et là miracle : nous tombons sur un groupe de 60 français surchargés qui réalisent un raid sportif avec l’Agence NED (Nature Extrême Développement). Surpris de nous voir ils nous apprendront que la liaison Khoujir – Oust Bargouzine n’existe plus et que le Ferry a été spécialement affrété pour eux ! Pardon ? Le chargement et déchargement seront sport mais la tonne de bagage suivra dans une belle ambiance au grand drame de l’hôtesse de bord qui s’arrachera les cheveux. On y rencontre Stéphan et Corine qui pédalent eux aussi sur un tandem Cyfac ! Nous passerons les 4 heures de traversée à discuter, en tentant de réaliser que nous glissons sur le Baïkal. Nous leur laisserons quelques affaires, merci à vous, et merci à Vincent Kronental, Photographe voyageur, pour ses jolis clichés !
En débarquant de l’autre côté, des français attendent le ferry : « alors c’est vous nos sauveurs ? Nous avons planifié tout notre voyage en fonction de ce bateau et on vient de nous dire qu’il était uniquement affrété aujourd’hui pour vous ». Nous ne sommes pas les seuls à qui la bonne étoile du voyageur aura fait grâce ce jour là…
Nous nous réjouissons de découvrir la côte est du lac, les vacances se terminent, après 3 semaines de pause. Un mélange d’appréhension et d’excitation accompagne la reprise. Nous avons uniquement 8 jours rejoindre la frontière et quitter la Russie à temps. Compte à rebours lancé !
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Tourisme, nature et déforestation
« Haaaa, le Baïkal… », nous répète-t-on souvent.
Oui, c’est une destination extrêmement courue par de nombreux touristes: un rêve, de grands espaces, des couleurs à peine croyables, une nature puissante et belle, un climat rude, du sauvage en barre.
Il est courant de croiser des minibus blindés de touristes chinois pressés de faire le tour de l’île sur la journée, manger quelques pirojkis en sirotant de la mauvaise vodka et dormir dans un de ces hôtels de bois ostentatoires qui font tache dans cette nature qui se suffit à elle même.
A la tombée de la nuit les dizaines de petits feux laissent imaginer le nombre de campeurs dans les sous-bois tout autour de la ville. Ils brûlent chaque soir ce que la nature a difficilement réussi à fournir sur l’année. Aussi cette petite ville de pêcheurs n’est plus aujourd’hui bordée de forêts comme elle l’était autrefois.
Nous rencontrons quelques bénévoles et artistes sous leur yourte verte cherchant à récolter des fonds pour replanter ces forêts. Ces artisans créent et fabriquent pour redonner à leur espace sa richesse d’antan. Les objets proposés sont respectueux de leur nature et la démarche nous touche : poterie, amulettes, statuettes et autres bijoux.
Cette poignée de militants agit au mépris des habitants de Khoujir et des autorités. Nous recommandons chaudement de faire un petit passage sous cette yourte.
Nous montons à bord du mythique Transsibérien tout ému de quitter nos hôtes, le cœur chargé d’adrénaline et légèrement transpirant ! Nous découvrons notre nouvelle demeure pour les 4 prochains jours et nos nouveaux colocataires, légèrement nombreux (60) !
Bon le train en lui-même n’a vraiment rien de mythique et nous sommes déçus par la banalité de la locomotive.
Nos deux hôtesses nous proposent – imposent – de payer les draps et les serviettes : pas question, nous avons les nôtres et nos sacs à viande, et comme tout baroudeurs qui se respectent nous n’allons pas payer pour ça ! 2 heures plus tard, nous nous retrouvions dans leur cabine, la queue entre les jambes, à acheter tout le nécessaire… oui en voyant les autres passagers s’installer et au vue de la température légèrement élevée (30°), nous avons réalisé que nous n’étions peut-être pas à 1,50 euros près… nous ne regretterons pas notre investissement.
Contrairement à leur réputation, qui n’est plus à faire, nous aurons la chance d’avoir deux jeunes hôtesses qui s’avèreront la plupart du temps souriantes et compréhensives. Ce qui ne sera pas le cas dans les autres wagons !
Nous avons tout prévu pour mettre à profit tout ce temps libre : bouquins, films, émissions radio, nourriture à profusion, siestes, écriture d’articles, de mail… mais c’était sans compter qu’à peine 2h après notre départ nous sympathisions déjà avec Yumi, un thaïlandais étudiant à Taïwan et revenant d’un stage en Hollande en mode backpackers, et Johannes, un allemand partant étudier à Taïwan… en vélo ! La première nuit nous dormons plus de 13 heures d’affiler, c’est dire si on peut bien dormir en 3ème classe – moyennant masque de nuit et boules quies bien entendu – la seconde journée n’est donc plus qu’une après-midi !
Finalement nous passerons notre temps à discuter, à refaire le monde, à passer d’un wagon à l’autre, à regarder le paysage – et quelques films – à bouquiner un peu ; notre vie sera rythmée par les pauses du train (3 – 4 pauses d’au moins 20 min par jour qui permettent de se dégourdir les jambes – surtout lorsque le train s’apprête à partir sans vous – et de se ravitailler), nous finirons cette étape dans une joyeuse ambiance, avec notre dream team, à s’écrire des mots dans nos carnets d’adresse respectifs comme à la fin d’une colo, et à trinquer à la vodka achetée à Moscou pour l’occasion !
Ca passera trop vite, nous n’aurons aucun mal à nous débarbouiller chaque soir dans les toilettes, moyennant un bon ancrage au sol et des chaussures parfois mouillées, nous aurons une chance inouïe de dormir à côté de russes forts sympathiques, discrets, serviables, sans enfant et propres ( !) – ce qui ne sera pas le cas de tous – dont l’une parlant anglais nous permettra de pouvoir échanger et sympathiser. Les gares principales seront très impressionnantes, les paysages bien plus variés qu’annoncés et très beaux, et finalement le plus dur à gérer sera le décalage horaire ! Nous serons complètement perdus entre Moscou Time et Irkoutsk Time. Le dernier soir alors qu’il est minuit, personne ne trouve le sommeil quand le premier jour tout le monde dormait à point fermé. Nous avons « gagné » 5 heures. C’est très drôle de voir l’évolution du temps, nous ne savons plus quand manger, quand dormir, l’heure du train reste à celle de Moscou, alors il nous faut sans cesse calculer. Tout monde est déphasé.
Avis aux filles, les russes peuvent vite tomber amoureux, surtout sous l’effet de la vodka, et même si vous êtes accompagnés, attention à vos sourires ^
En bref, nous n’aurions pu rêver mieux, si, que ça dure un jour ou deux de plus ! Nous venons de faire autant de kms en train en 3,5 jours que nous en avons fait en Vélo en 3 mois!
Nous voilà à Irkoutsk, pas mécontents de retrouver un bon lit, une douche, de l’espace, de l’air, de l’eau fraiche. En transit seulement, dans une auberge de jeunesse – première que nous nous offrons – avant de reprendre la route vers le lac Baïkal. Cette fois nous testons le minibus, direction Olkhon, la plus grande île du lac Baïkal, où nous devrions passer une semaine autour de Khoujir, le village le plus peuplé, attendant le ferry qui nous transportera de l’autre côté, rive est (un seul par semaine). L’île se trouve au cœur de bon nombre de légendes et de contes, elle est notamment considérée comme le centre sacré du monde des chamans du Nord ! On vous dira ça.
A bientôt !
Est-ce que tu as déjà :
Fait 5000 Km pour moins de 100€ et en 3,5 jours (50 km pour 1€ à un peu moins de 60 km/h de moyenne) ?
Fait rentrer un tandem et sa remorque dans un train couchette ?
Vécu en pyjamas pendant 3 jours ?
Partagé un espace de 10 m2 avec 4 inconnus avec qui tu ne partages ni la langue ni la culture ?
Vécu avec 60 colocataires ?
Pris ta douche dans les toilettes d’un train ?
Visité de multiples gares au pas de course de jour comme de nuit ?
Demandé pendant 3 jours quelle était la vraie heure ?